Le Fin mot de l'histoire by Thomas Snégaroff

Auteur:Thomas Snégaroff
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Tallandier
Publié: 2015-03-14T16:00:00+00:00

Marcel Cerdan

* * *

28 octobre 1949

Le boxeur monte dans l’avion. C’est un dimanche. Le 23 octobre 1949. Sur le tarmac du petit aérodrome du Camp Cazes à Casablanca, Marcel Cerdan embrasse sa femme Marinette et ses enfants pour la dernière fois. Marcel Jr. est déjà un grand garçon. Six ans. Il sait que son père sera bientôt en Amérique pour affronter Jack La Motta au Madison Square Garden de New York. Son frère René est trop petit pour ressentir autre chose que de la tristesse à l’idée de devoir se passer, une fois encore, de son papa. Il n’a que quatre ans. Quant à Paul, c’est un nourrisson de trois semaines.

Jack La Motta n’est pas un bon souvenir pour Cerdan. Il a perdu contre lui sa ceinture de champion du monde en juin de cette année-là. Une défaite qui ne passe pas. Dixième poids moyen mondial, l’Américain n’est pourtant pas le challenger le plus évident pour affronter « le bombardier marocain », Marcel Cerdan. Rien ne le désigne, sinon sa nationalité et ses liens prétendus avec la mafia. Contraints d’avoir dû assister à la perte de la ceinture de champion du monde après la défaite de Tony Zale en septembre 1948, battu par K.O. technique par Cerdan, les Américains entendent récupérer le titre. Et vite. Organisé à Détroit, le combat entre Cerdan et La Motta a tout du traquenard. Un combat avancé d’une demi-heure, histoire de ne pas permettre à Cerdan de s’échauffer, un tapis de sol glissant qui gêne le Français dès les premières secondes. Qui tombe et se luxe l’épaule. La douleur est insupportable. Et sagement, à la 11e reprise, son manager lui demande d’abandonner. Au pire, la revanche arrivera bientôt. Le choc est immense en France où Cerdan est devenu une grande star. Ils sont cependant encore des milliers à l’attendre à son retour d’Amérique. Certes, ils étaient plus nombreux pour fêter son titre de champion du monde, mais l’admiration qu’on lui voue a résisté à la défaite.

Son histoire d’amour avec Édith Piaf, longtemps maintenue secrète – Cerdan est marié –, est désormais sur toutes les lèvres. Les deux stars se sont rencontrées à New York en 1947 ; leur idylle a commencé aussitôt. Pudiques, les journaux parlent d’une « belle amitié » mais personne n’est dupe. Et notamment Marinette qui souffre énormément de cette situation. En février 1950, après avoir beaucoup hésité, Marinette invitera Édith avec qui elle partage le deuil d’un amour perdu à venir la rejoindre au Maroc : cette dernière débarquera les bras chargés de cadeaux et, à la surprise de beaucoup, les deux femmes sympathiseront.

L’avion qui décolle de Casablanca ne va pas directement à New York. Il reste une chose à faire avant de s’envoler pour le Nouveau Monde. Filer à Troyes pour une exhibition organisée par Charlie Mittel, l’un des fondateurs du cabaret du faubourg Montmartre « Le Club des Cinq » dans lequel Cerdan a pour la première fois entendu chanter « la môme » en 1946… Charlie a aussi

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